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Peut-on (vraiment) devenir plus confiant grâce aux « Power poses » ?

En communication non verbale, on affirme souvent que notre état d’esprit influence notre langage corporel. Mais a contrario,  notre langage corporel peut-il également influencer notre état d’esprit ? Avec plus de 33 millions de vues depuis son TED Talk de 2012, Amy Cuddy a suscité un véritable buzz autour de ce qu’elle a appelé les « Power poses », des positions typiques du pouvoir qui lorsqu’elles seraient adoptées auraient une influence directe et quasi-instantanée sur nos comportements, impliquant ainsi que chacun aurait la possibilité de modifier son attitude et même la chimie de son propre corps par un simple changement de posture. Problème : certaines études pointent du doigt le manque de répétabilité de ses résultats.

Une posture corporelle peut-elle jouer sur notre état d’esprit ?

Dans une étude menée en 20101 en collaboration avec l’université Columbia et l’université de Harvard, Dana Carney, Amy Cuddy et Andy Yap ont obtenu des résultats semblant mettre en avant l’existence de « positions de pouvoir » permettant d’induire des changements comportementaux et neuroendocriniens.

Power poses faible position Amy Cuddy

Exemple de position de « faible pouvoir »

Power poses Amy Cuddy

Exemple de position de « fort pouvoir »

Comment ces chercheurs en sont-ils arrivés à cette conclusion ? Dans leur étude, 26 femmes et 16 hommes ont dû adopter pendant 2 minutes soit des postures qualifiées par les chercheurs de « postures de fort pouvoir », soit des postures de « faible pouvoir ». Pour s’assurer que les participants de l’étude restent le plus naturels possible, les chercheurs ont prétendu que le but de l’étude était de déterminer si la position d’électrodes (placées soit en dessous soit au-dessus du cœur) pouvait influencer les données d’un électrocardiogramme.

En réalité, les expérimentateurs avaient un objectif tout autre : évaluer si les participants étaient prêts à prendre plus ou moins de risques, ainsi que leur sentiment de puissance, selon qu’ils y aient ou non adoptés des « Power poses » pendant à peine deux minutes. La prise de risque a été évaluée pour chacune des postures via un jeu d’argent et le sentiment de puissance via un questionnaire d’auto-évaluation (« Quel degré de puissance ressentez-vous ? »).

Pour aller encore plus loin dans leurs analyses, les chercheurs ont également voulu relever les taux de deux hormones, la testostérone (l’hormone de la domination) et le cortisol (l’hormone du stress), qu’ils ont mesuré en collectant des échantillons de salive avant et une vingtaine de minutes après l’adoption d’une position de puissance par les participants.

Une position de puissance pour plus de confiance

Les résultats ? 86% des participants ayant adopté une position de fort pouvoir sont prêts à parier de l’argent, tandis qu’ils ne sont que 60% dans le cas des participants à position de faible pouvoir. En d’autres termes, les positions de fort pouvoir induiraient une confiance en soi plus grande chez les participants, les amenant à prendre plus de risques.

Au niveau physiologique, les participants en position de fort pouvoir auraient vu leur taux de testostérone augmenter de près de 20% (+8pg/ml), tandis que ceux en position de faible pouvoir ont subi une baisse de près de 10% (-5pg/ml).

A l’inverse, les taux de cortisol auraient connu une baisse de 25% chez les participants en position de fort pouvoir, tandis alors qu’ils auraient augmentés de 15% en moyenne chez les participants en position de faible pouvoir.

Le tout, après seulement deux minutes de « Power poses » donc. En d’autres termes, un changement de position induirait une modification physiologique du corps, sécrétant davantage de testostérone (liée à la domination) en posture de pouvoir, et libérant plus de cortisol (lié au stress) en posture de faiblesse.

Ces changements hormonaux captés par nos cerveaux lui indiqueraient donc s’il faut agir de manière dominante et assertive, ou au contraire de manière anxieuse et stressée.

Des résultats impressionnants…à relativiser ?

Le Ted Talk de 2012 d’Amy Cuddy a connu un incroyable succès dans le monde entier, jusqu’à devenir le 2e Ted Talk le plus regardé de tous les temps avec plus de 33 millions de vues.

Elle a également fait couler beaucoup d’encre, si bien que d’autres chercheurs se sont penchés sur son étude. En particulier, l’équipe d’Eva Ranehill de l’université de Zurich a rédigé en 2014 un article2 dans lequel elle émet de fortes réserves quant aux résultats donnés par Amy Cuddy. Impossible pour elle en effet de répliquer les conclusions des tests menés par la psychologue et ses collègues.

Si l’on en croit le papier d’Eva Ranehill, la proportion de choix risqués pris par les participants, qu’ils adoptent une position de faible ou de fort pouvoir, n’était pas significativement différente dans son étude. Les taux hormonaux relevés chez les participants non plus. Ces résultats, qui ne confirment donc pas l’étude réalisée par Amy Cuddy et ses collègues, sont à prendre avec d’autant plus de considération qu’ils ont été menés sur un bien plus grand nombre de participants que dans l’expérience initiale d’Amy Cuddy (N=200 vs N=42 participants). Or, en sciences comportementales comme dans toutes les sciences en général, une expérience non répétable pose un sérieux problème quant à la fiabilité de ses résultats.

En revanche, cette étude a bien confirmé le fait que les participants ayant adopté une posture de fort pouvoir ont rapporté se sentir significativement plus puissants.

Dès lors, que faire des résultats avancés par Dana Carney, Amy Cuddy et Andy Yap ?

Notre recommandation : avant un entretien d’embauche, une réunion importante ou tout autre situation stressante pour vous, prenez deux minutes pour vous isoler et adopter une Power pose juste avant de rejoindre vos interlocuteurs. Effet placebo ou non, vous vous sentirez plus en confiance…et n’est-ce pas là au fond l’essentiel ?

Que pensez-vous des Power poses et de leur validité ? Rendez-vous sur notre page Facebook pour partager avec nous votre avis.

Références :

1 Carney, D., Cuddy, A., & Yap, A. (2010). Power Posing: Brief Nonverbal Displays Affect Neuroendocrine Levels and Risk Tolerance. Psychological Science, 21(10), 1363-1368. http://dx.doi.org/10.1177/0956797610383437

2 Ranehill, E., Dreber, A., Johannesson, M., Leiberg, S., Sul, S., & Weber, R. (2015). Assessing the Robustness of Power Posing: No Effect on Hormones and Risk Tolerance in a Large Sample of Men and Women. Psychological Science, 26(5), 653-656. http://dx.doi.org/10.1177/0956797614553946

Crédits photo : PoptechDefence Images

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